Aller au contenu
Accueil » Blog » Transformation durable de son entreprise : les bonnes raisons de missionner son avocat !

Transformation durable de son entreprise : les bonnes raisons de missionner son avocat !

Dans notre contexte de transition, les entreprises sont de plus en plus nombreuses à se mettre en chemin pour exercer leur activité de manière plus engagée, plus durable, que ce soit sur le plan environnemental ou sur le plan social. Cette dynamique de transformation ne concerne pas uniquement les grands groupes et les ETI, elle touche aussi désormais les porteurs de projets, qui incarnent la vision et les attentes des nouvelles générations Y Z, ainsi que la masse des TPE et PME qui forment le socle du tissu économique français.

 

Cependant, le dirigeant d’entreprise qui souhaite aujourd’hui traduire sa prise de conscience par des actions concrètes n’est pas forcément équipé pour comprendre le champ des possibles.

 

Le rôle des cabinets de conseil en RSE ou en stratégie de transformation est ici bien compris. Mais sur le plan de la mise en œuvre, qu’en est-il du rôle des avocats / conseils juridiques[1] ?

 

Loin d’être à la marge de ce phénomène sociétal, les avocats ont un rôle primordial à jouer pour accompagner l’entreprise dans la mise en œuvre de la transformation durable de l’entreprise. Pourquoi ?

Éclairage sur l’intérêt de se doter d’un avocat « engagé »[2].

 

En premier lieu, en amont d’un cabinet de conseil RSE, l’avocat peut détecter les besoins des dirigeants et leur apporter le bon niveau d’information :  orienter les dirigeants dans la jungle des labels[3], améliorer leur degré de compréhension quant à l’articulation des différents dispositifs qui existent : démarche RSE, différentes certifications, sociétés à mission, agrément ESUS pour le secteur de l’ESS, dispositifs de mécénat, etc. Il faut parvenir à démêler les enjeux de chaque dispositif, comprendre leurs complémentarités. De même, l’avocat aide l’entreprise à distinguer ce qui relève de la soft law (politique volontariste de l’entreprise) de ses obligations légales. Et surtout, jouer le rôle d’alerte en amont, précisément lors du passage au « droit dur ».

 

Une fois que l’entreprise aura défini sa stratégie d’engagement et la forme qu’elle souhaite lui donner, son avocat l’aidera à mettre en œuvre son nouveau positionnement et à rendre ses engagements concrets. Seul l’avocat est à même de traduire formellement le socle de réflexion dégagé par l’équipe dirigeante, lui donner vie, le matérialiser dans les statuts de l’entreprise.

 

Par exemple, pour une société qui veut devenir à mission, il est important que l’avocat soit mandaté pour co-rédiger la raison d’être et les objectifs que l’entreprise entend s’assigner pour satisfaire à sa mission. Il sera également utile pour s’assurer que les engagements pris par l’entreprise sont précis et susceptibles de faire l’objet d’un contrôle tangible par l’organisme tiers indépendant (OTI) qui sera saisi dans les 24 à 36 mois suivant l’officialisation du statut de société à mission (délai variable selon la taille de l’entreprise). Loin de se cantonner à l’application d’un « sceau » sur un travail de réflexion déjà finalisé par l’entreprise, l’avocat engagé sur ces sujets a toute son utilité pour aider l’entreprise à rédiger les engagements sociaux et environnementaux qui matérialisent sa raison d’être.

 

Dans le secteur de l’ESS, l’avocat sera à même par exemple de suggérer l’obtention d’un agrément ESUS[4] ou d’aider l’entreprise à correspondre aux critères de qualification contrôlés par la DIRECTTE pour l’obtention de cet agrément, voire préconiser les modifications statutaires nécessaires à l’obtention de cet agrément.

 

Ensuite, l’avocat a aussi un rôle déterminant à jouer dans l’analyse des enjeux contractuels qui découlent de l’orientation de la politique de RSE de l’entreprise, en insérant ou en relisant les clauses de responsabilité dans les contrats d’achat, de fourniture, mais aussi sur des enjeux liés à l’obtention de financements, au déclenchement d’investissements, etc.[5] A l’égard des fournisseurs par exemple, l’avocat peut s’assurer de la précision suffisante des objectifs visés par la clause, en dépassant la simple référence aux principes généraux des instruments internationaux, en prévoyant des sanctions en cas de non-respect des exigences contractuelles. D’une manière générale, en contextualisant les clauses RSE et en assurant leur cohérence avec le contrat dans son ensemble.

 

En réalité, si l’avocat est impliqué sur ces sujets, son champ d’intervention est très large et il est susceptible d’accompagner l’entreprise sur tous les aspects de sa stratégie de transformation durable.

 

L’avocat peut aussi être force de proposition pour mettre en œuvre des projets innovants dans l’entreprise ou affirmer son rôle de garant de la bonne conformité de l’entreprise face aux évolutions de la réglementation.

Quelques exemples de missions

 

Il peut par exemple proposer de structurer un programme de mécénat en interne, avec des leviers fiscaux ou managériaux intéressants, tel que la création d’une fondation d’entreprises par exemple ou d’un fonds de dotation ou encore la mise en œuvre de partenariats avec des structures de l’ESS (fondations, associations, coopératives, etc.).

 

Pour les entreprises qui souhaitent s’emparer de la problématique de la gouvernance, l’avocat aidera à mettre en place des politiques d’actionnariat salarié, par exemple en organisant l’émission de bons de souscription de parts de créateurs d’entreprises (BSPCE) ou d’un plan d’attribution gratuite d’actions (AGA), etc.

 

De même, il peut être fructueux de confier à son avocat une mission de veille réglementaire sur les secteurs qui correspondent aux axes de développement de la politique RSE de la société, afin d’être en mesure de faire évoluer correctement ses pratiques et témoigner à ses diverses parties prenantes de l’implication réelle sur le projet RSE mis en place.

Prenons par exemple le cas d’une PME qui aurait décidé dans le cadre de sa politique RSE de mettre en place courant 2018 un projet de jardin potager dans ses locaux.

En admettant qu’elle utilise le rendement de son potager pour la production de son restaurant d’entreprise et que ce projet soit bien perçu par les collaborateurs, ils ont dorénavant l’occasion de participer quelques heures par mois à cette production agricole sur leur temps de travail. Imaginons maintenant que dans le cadre de ce projet à impact positif, l’entreprise a demandé à son avocat de la tenir régulièrement informée des évolutions législatives relatives aux pratiques agricoles. Il se trouve qu’en juin 2020[6], une nouvelle loi est entrée en vigueur sur la question des semences paysannes, loi qui est venue autoriser en France la vente de semences de variétés appartenant au domaine public (jusqu’à lors interdite) pour favoriser l’enrichissement de la biodiversité agricole par les jardiniers amateurs. Le suivi de cette évolution législative a été l’occasion d’organiser un atelier d’information et de sensibilisation des collaborateurs. Quelques mois plus tard, cet atelier a germé et conduit à une évolution du projet, certains collaborateurs ayant décidé de se mobiliser pour trouver un fournisseur de semences nouvelles, localement. Cet exemple illustre bien que la veille réglementaire est un outil de développement intéressant qui peut alimenter la mise en œuvre d’un des volets de la politique RSE d’une entreprise.

 

D’une manière plus traditionnelle, l’avocat a un rôle à jouer dans le suivi des obligations réglementaires spécifiques au secteur d’activité de l’entreprise, pour lui permettre d’anticiper des règles appliquées aujourd’hui à titre volontariste appelées demain à devenir contraignantes. On pense par exemple récemment aux nouvelles obligations en matière de recyclage des déchets pour les entreprises du secteur du BTP[7], aux obligations relatives aux traitements des déchets dans les entreprises[8], aux obligations d’information du CSE en matière environnementales[9], etc.

 

Ce rôle de l’avocat qui veille à la « conformité de l’entreprise », n’est pas nouveau mais il est renforcé par l’emprise croissante du législateur sur les obligations des entreprises. Initié avec la loi NRE dès 2001 avec l’instauration d’obligation de reporting pour les sociétés côtés, le mouvement s’est poursuivi avec la loi sur le devoir de vigilance de 2017[10] et plus récemment avec la loi PACTE en mai 2019[11]. Le phénomène dépasse la RSE et s’inscrit dans le sens d’une évolution sociétale plus profonde, qui permet à l’entreprise privée de se penser de manière plus éthique au sens large (plus démocratique, plus transparente, plus sociale, plus respectueuse de l’environnement, etc.) mais qui nous inscrit aussi dans un système complexe où les contraintes juridiques sont toujours plus prégnantes et où il devient difficile de se passer de l’éclairage d’un avocat.


[1]  Article 10 de la loi n° 2020-699 du 10 juin 2020 relative à la transparence de l’information sur les produits agricoles et alimentaires : https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000041982762?r=Aw6

[2] La loi n°2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire dite « AGEC » et ses décrets d’application https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000041553759?r=3nGZnu54TY

[3]   Le décret tri 5 flux : Dans le prolongement de la loi sur la transition énergétique, et en complément de l’obligation sur le tri et la valorisation des emballages professionnels (Art. R 543-66 à 72 du code de l’Environnement), le décret n°2016-288 du 10 mars 2016 oblige depuis le 1er juillet 2016 au tri à la source et à la valorisation de 5 flux de déchets (Art. D 543 à 287 du code de l’Environnement).

[4]   Voir le projet de loi Climat et résilience en cours d’adoption parlementaire à ce jour. https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/textes/l15b3875_projet-loi

[5]   Loi n°2017-399 du 27 mars 2017 relative au devoir de vigilance des sociétés mères et entreprises donneuses d’ordre.

[6]   La loi Pacte date du 22 mai 2019 mais le décret d’application est entré en vigueur en janvier 2020.

https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/article_jo/JORFARTI000038496249 et le décret d’application : https://www.legifrance.gouv.fr/loda/id/JORFTEXT000039749343/


[1]   L’agrément « Entreprise solidaire d’utilité sociale » dit « ESUS » est un dispositif créé par la Loi n°2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire (ESS). L’obtention de cet agrément favorise l’accès aux financements et attire les investisseurs avec des dispositifs fiscaux incitatifs.

[2]   AFFECTIO MUTANDI/ECOVADIS, Le contrat et les clauses RSE, leviers incontournables de vigilance : Etude croisée 2018 acheteurs-fournisseurs sur les clauses contractuelles RSE.


[1]   En réalité, c’est un pléonasme de parler d’avocat « engagé ». Le rattachement de la profession d’avocat à des règles déontologiques, aux termes desquels l’avocat fait le serment d’exercer sa profession avec « Dignité, Conscience, Indépendance, Probité et Humanité », devrait faire de lui par essence un acteur de la transformation sociale et environnementale à l’œuvre dans la société. Le terme est néanmoins utilisé ici pour désigner l’avocat qui s’est saisi de sujets nouveaux et d’en comprendre les enjeux juridiques pour leur clientèle.

 

[2]   De nombreux labels de certification et d’évaluation de la performance coexistent par exemple : ECOLABEL, ECOVADIS, LUCIE GREAT PLACE TO WORK, ISO 26000, et plus récemment à l’échelle monde, la certification B-Corp (Benefit Corporation), etc.

 

 

 


[1]   Depuis 1992 (Loi du 10 août 1991 sur la profession d’avocat), les professions d’avocat et de conseil juridique ont fusionné pour n’en former qu’une seule, sous le vocable unique « d’avocat ». L’avocat n’est pas cantonné à plaider dans les prétoires, il a aussi pour mission de conseiller le client pour tout ce qui relève du domaine juridique, en dehors de tout contentieux.

 

Pour consulter l’article sur le site de People4Impact, cliquez ici

Elsa Lourdeau Avocat Lyon Droit Commercial & Immobilier

Elsa Lourdeau

Avocat – Barreau de Lyon

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

E.L. Avocat